L’administration Trump prévoit de bâtir des camps de concentration sur des bases militaires aux États-Unis

Des migrants sont assis dans un avion militaire à Fort Bliss à El Paso, Texas, jeudi 30 janvier 2025, en attendant leur expulsion vers le Guatemala. [AP Photo/Christian Chavez]

Vendredi dernier, le New York Times, citant trois responsables de l'administration Trump, a rapporté que la Maison-Blanche envisageait de détenir des hommes, des femmes et des enfants sur des bases militaires à travers les États-Unis, dans un exemple d'utilisation de « ressources en temps de guerre pour concrétiser les déportations massives promises par le président ».

Le Times a rapporté que l'administration Trump commencera par construire un « centre d'expulsion » sur la base militaire américaine tentaculaire de Fort Bliss, près d'El Paso, au Texas. Citant « trois responsables au courant du plan », le Times a indiqué que la base prévoyait d'emprisonner « jusqu'à 10 000 » personnes.

Ce n'est pas la première fois, de mémoire récente, que Fort Bliss est utilisé comme centre de détention massive de migrants. En 2021, l'administration Biden a envoyé des milliers d'enfants non accompagnés sur la base, où ils étaient logés dans des « tentes de la taille d'un entrepôt avec des lits de camp superposés », selon un rapport du Bureau de l'inspecteur général. Ce rapport indique que certains enfants ont souffert de crises de panique après avoir passé plus de 60 jours sans parler à un responsable de dossier ou sans avoir été libérés aux États-Unis.

Contrairement à l'utilisation de Fort Bliss par l'administration Biden, Trump et sa cabale de fascistes prévoient d'étendre la portée et l'ampleur de l'internement dans les bases militaires à travers le pays. L'administration Trump envisage le camp de concentration de Fort Bliss comme un « modèle » qui pourrait être exporté vers d'autres bases militaires pour détenir des milliers de personnes supplémentaires, conformément à la promesse de Trump de mener la plus grande opération d’expulsion de l'histoire des États-Unis.

Alors que les plans de construction d'un réseau de camps d'internement militarisés sont encore dans les phases initiales, le Times a rapporté qu'en plus de Fort Bliss, d'autres installations militaires sont envisagées, notamment la base aérienne de Hill dans le nord de l'Utah, la base spatiale de Buckley à Aurora, dans le Colorado ; la base Kirtland de l’Air Force à Albuquerque, au Nouveau-Mexique ; la base Homestead de l’Air Force, située dans le comté de Miami-Dade, en Floride ; la Niagara Falls Air Reserve Station à Niagara Falls, dans l'État de New York ; et la base McGuire-Dix-Lakehurst, au sud-est de Trenton, dans le New Jersey.

Quatre-vingt-trois ans après que le président Franklin Delano Roosevelt a promulgué le décret 9066 mandatant la détention indéfinie de toutes les personnes d'ascendance japonaise vivant sur le continent américain pour la durée de la guerre avec le Japon, l'administration Trump se prépare à emprisonner des dizaines, voire des centaines de milliers de migrants et leurs familles sur les bases militaires américaines.

À partir de 1942, le gouvernement américain a expulsé plus de 120 000 Américains d'origine japonaise de leur domicile et les a détenus pendant une période pouvant aller jusqu'à quatre ans dans un réseau de camps de prisonniers en zone reculée. Ce qui est actuellement envisagé élargit considérablement ce crime historique et menace les droits démocratiques des travailleurs du monde entier.

Il ne fait aucun doute que face à la résistance à Trump et aux projets de dictature de l'oligarchie, les immigrés comme les citoyens, tous ceux qui sont considérés comme « l'ennemi intérieur » de l'oligarchie financière, risquent d'être enlevés et emprisonnés.

À la suite de l'article du Times, la National Public Radio, citant une note interne du ministère de la Sécurité intérieure (DHS), a confirmé lundi que l'agence demandait au ministère de la Défense de « préparer les détenus en vue de leur expulsion des États-Unis ».

Selon la note consultée par NPR, le DHS demande que jusqu'à 1000 immigrants soient emprisonnés à Fort Bliss pour une « période d'évaluation » de 60 jours, mais ce chiffre pourrait atteindre 10 000 lorsque la base sera transformée en « plaque tournante pour les opérations d'expulsion ».

Le DHS et ses sous-agences, telles que l’Immigration and Customs Enforcement (ICE) et la Customs and Border Protection (CPB), sont actuellement à leur « capacité maximale », incarcérant quelque 41 000 personnes dans des établissements privés à but lucratif pour la plupart.

Le mois dernier, l'administration Trump a repris la détention de personnes dans le tristement célèbre complexe de prison/torture de Guantánamo Bay, à Cuba. Signalant le retour de la détention illimitée, Trump a déclaré le mois dernier : « Certains d'entre eux sont si mauvais que nous ne faisons même pas confiance aux pays qui les détiennent parce que nous ne voulons pas qu'ils reviennent, alors nous allons les envoyer à Guantánamo. »

La décision de Trump d'utiliser des bases militaires pour l'internement est un signe supplémentaire de l'effondrement des formes démocratiques de gouvernement et souligne que la classe dirigeante américaine se prépare à faire revivre et à étendre les pires crimes de l'histoire non seulement des États-Unis, mais de toute l'histoire du monde. Samedi, lors du discours d'ouverture de la Conservative Political Action Conference, Trump, à la grande joie des néonazis et des insurgés du 6 janvier présents, dont Enrique Tarrio des Proud Boys, a commencé son discours en dénonçant les « marxistes radicaux de gauche » et en se vantant que « les criminels étrangers illégaux sont renvoyés dans leur pays d'origine ».

CBS a rapporté dimanche, citant des documents internes du gouvernement, que l'administration Trump prévoit d'expulser les immigrants « au motif qu'ils pourraient propager des maladies comme la tuberculose ». L'administration Trump cherche à relancer la politique de son premier mandat consistant à utiliser le titre 42, une vaste autorité relevant des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies, qui « qualifierait les migrants non autorisés qui tentent d'entrer aux États-Unis de risques pour la santé publique ».

Ce décret permettrait aux agents des douanes et de la protection des frontières d'expulser n'importe qui, même ceux qui tentent de demander l'asile, sans audience.

Le titre 42 a été utilisé pour la première fois par l'administration Trump après l'émergence de la pandémie de COVID-19. En mars 2020, le conseiller fasciste de Trump, Stephen Miller, a exhorté Trump à invoquer le titre 42, non pas pour assurer la sécurité du peuple américain contre le virus mortel, mais pour fournir à Trump une arme pour mettre en œuvre son programme anti-immigrés.

Après l'élection de 2020, le président Joe Biden a poursuivi la guerre contre les immigrés et a utilisé le titre 42 pour rejeter les demandes d'asile, tout en supprimant tous les programmes sociaux liés à la pandémie et les protections de santé publique. Sous Biden comme sous Trump, plus de 2,5 millions de personnes ont été expulsées ou se sont vu refuser le droit de demander l'asile en vertu du titre 42, bien que Biden ait finalement mis fin à cette pratique après avoir démantelé toutes les politiques de lutte au COVID.

Les projets de Trump de remettre en œuvre le titre 42 n'ont rien à voir avec la protection de la santé publique, comme le prouve l'inaction du secrétaire à la Santé et aux Services sociaux pro-pandémie de Trump, Robert F. Kennedy Jr.

Les plans de l'administration Trump visant à établir un réseau de camps de détention militarisés ont été accueillis avec indifférence ou approbation par le Parti démocrate, qui est beaucoup plus terrifié par l'idée de susciter une opposition de masse à Trump et au système capitaliste que les deux partis défendent que par le retour du fascisme.

Le sénateur du Vermont Bernie Sanders, soi-disant indépendant, n'a rien dit sur les projets de Trump de construire des camps de concentration militarisés, mais il a à plusieurs reprises ces derniers jours tweeté et fait des discours depuis le Sénat pour dénoncer Trump pour avoir qualifié l'Ukrainien Volodymyr Zelensky de dictateur. « Poutine est un dictateur, pas Zelensky », a tweeté Sanders lundi.

Le silence des démocrates sur les projets de Trump n'est pas une erreur, mais souligne leur allégeance de classe commune. Tant les démocrates que les républicains, avec leurs auxiliaires syndicaux, vomissent un poison nationaliste pour diviser la classe ouvrière et diriger le mécontentement social vers les étrangers et les immigrants, par opposition à l'aristocratie financière qui exploite en réalité la classe ouvrière, source de son accumulation de richesses.

Les attaques bipartisanes contre les immigrés ont déjà suscité des manifestations de masse d'opposition à travers les États-Unis. Ces manifestations doivent être développées et étendues à un réseau de comités de défense communautaires organisés sur la base du fait que la classe ouvrière est une classe internationale et que le système capitaliste est incompatible avec la défense des droits démocratiques de tous les travailleurs, qu'ils soient nés dans le pays ou qu'ils soient immigrés.

(Article paru en anglais le 25 février 2025)