Nous encourageons tous les postiers en grève à contacter le World Socialist Web Site pour nous faire part de leurs commentaires et opinions sur la manière de faire avancer leur lutte en remplissant le formulaire à la fin de cet article.
Je m'appelle Daniel Berkley et je suis en grève avec 55 000 collègues de Postes Canada depuis plus d'une semaine. Le jeudi 25 septembre, nous avons spontanément débrayé après que le gouvernement libéral de Mark Carney a annoncé son intention de supprimer le service postal tel qu'il existe actuellement et de détruire des dizaines de milliers d'emplois. Nous avons pris une position courageuse, forçant la bureaucratie du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP) à déclencher une grève nationale. Mais une semaine plus tard, la question urgente qui se pose à nous est la suivante : comment pouvons-nous gagner notre lutte ? Quelle est la voie à suivre ?
Nous sommes avant tout confrontés à une lutte politique. Ce n'est pas seulement la direction de Postes Canada qui veut supprimer des emplois et porter atteinte à nos droits, mais aussi le gouvernement et l'ensemble des entreprises canadiennes. Tous voient l’assaut sur le service postal comme un test pour démanteler tous les services publics et imposer la misère à tous les travailleurs afin de financer l'enrichissement de l'oligarchie patronale et le réarmement militaire.
Il ne s'agit PAS d'une ronde de négociations collectives « normale ». Les conditions sont réunies pour que nous obtenions un soutien puissant de la part d'autres groupes de travailleurs, car notre combat est aussi le leur. Cependant, ce soutien ne viendra pas automatiquement. Nous devons nous battre pour l'obtenir en faisant de notre grève le fer de lance d'une mobilisation de masse plus large pour la défense de tous les services publics, des emplois et des droits des travailleurs. La bureaucratie du STTP y est farouchement hostile, nous devons donc construire nos propres organisations, des comités de base dirigés par les grévistes eux-mêmes, afin de transmettre ce message aux travailleurs de l'automobile, aux autres livreurs de Purolator et d'Amazon, aux travailleurs du secteur public et à d'autres.
La ligne actuelle préconisée par la direction du STTP revient à nous faire attendre passivement que le gouvernement nous ordonne de reprendre le travail. Tant que le STTP nous maintiendra isolés des autres travailleurs, le gouvernement pourra faire traîner notre grève, nous épuiser pendant une longue période, avant de finalement nous ordonner de reprendre le travail. Nous serons affamés avec nos indemnités de grève, Postes Canada perdra de l'argent, et le gouvernement et les grandes entreprises auront les mains libres pour poursuivre leurs attaques contre nous sans relâche.
L'avenir de tous les services publics canadiens est en danger, et les questions pour lesquelles nous nous battons concernent tous les travailleurs ! Le droit de grève, le contrôle des travailleurs sur les nouvelles technologies et la précarisation des emplois touchent tout le monde. Nous devons devenir le fer de lance d'un mouvement plus large de la classe ouvrière pour la défense du droit de grève, de services publics de haute qualité et d'emplois décents. Une semaine après le début de notre grève, nous devons lancer un appel urgent aux autres secteurs de travailleurs afin d'élargir notre mouvement contre un gouvernement d'austérité capitaliste et de guerre impérialiste.
Dans l'annonce qui a provoqué notre grève, le ministre Joël Lightbound a déclaré que le gouvernement du Canada accepterait toutes les recommandations formulées par la Commission d'enquête sur les relations de travail (CERT). Cette commission, présidée par William Kaplan, le même homme qui a joué un rôle clé pour écraser la grève d'Air Canada, était truquée dès le départ. Le STTP, désireux de contribuer à faire respecter l'interdiction de grève que le gouvernement nous avait imposée en décembre, a pleinement participé à la CERT, contribuant ainsi à justifier le recours punitif du gouvernement aux articles 107 et 108 du Code canadien du travail. Son silence tout au long de la lutte des agents de bord a permis d'éviter des questions clés telles que « Pourquoi les agents de bord ont-ils défié le gouvernement, mais pas nous ? »
Alors que le syndicat conspirait avec la CERT à Ottawa tout au long des mois de janvier et février, les postiers de la base à travers le Canada ont été muselés et encouragés par le syndicat à rester passifs. Les bureaucrates nous ont dit d'envoyer des lettres et des courriels inutiles aux bureaux des députés afin d'exercer une « pression » sur un gouvernement et un establishment politique déterminés à détruire nos moyens de subsistance et à décimer les services publics. Une crise existentielle se développait à la poste.
Aujourd'hui, cette crise a pris une forme concrète. Les principales recommandations discutées par le gouvernement, l'employeur et le syndicat lors des réunions de la CERT ont un nouveau nom : « Phase 1 » d'une restructuration radicale. Les attaques proposées contre le public et contre nous, les travailleurs de la base, comprennent la fin de la distribution à domicile, la fin de la distribution du courrier cinq jours par semaine, la transformation de tous les points de vente postaux (RPO) en franchises et l’élimination des week-ends et des jours fériés pour les nouvelles catégories de travailleurs. Les nouvelles technologies d'automatisation et d'intelligence artificielle, qui offrent un potentiel de progrès sans précédent, ne seront pas utilisées pour faciliter notre travail sans perte de salaire et améliorer les services. Non, l'automatisation sera plutôt utilisée pour supprimer des emplois, dégrader les conditions de travail et surcharger ceux qui restent. De vastes licenciements, pouvant toucher jusqu'à 30 000 postiers et plus, ont été évoqués dans la presse canadienne.
La classe dirigeante a élaboré son programme impitoyable de guerre de classe, et nous devons faire avancer notre stratégie pour la classe ouvrière. Les piquets de grève actuels ont été mis en place à partir de la base, mais il faut plus que du militantisme spontané. Nous avons poussé la direction du STTP à reculer pour forcer une grève, mais celle-ci, avec ses alliés au sommet du Congrès du travail du Canada (CTC), s'est maintenant regroupée et poursuit la même politique désastreuse qui consiste à nous isoler de tous les autres travailleurs sur les piquets de grève, tout en suppliant le gouvernement pro-patronal de négocier.
Les travailleurs doivent lutter pour donner une expression militante à leur hostilité envers les attaques dont nous sommes victimes, en créant des comités de grève de la base dans chaque dépôt, centre de tri et autre lieu de travail. La base peut ainsi unifier sa lutte avec celle d'autres secteurs de travailleurs, en mobilisant les travailleurs de Purolator, Amazon, UPS et même ceux du service postal américain et d'autres à nos côtés. Ils sont tous confrontés à des attaques similaires contre leurs conditions de travail et de vie. Nous pouvons et devons approfondir notre lutte, en nous positionnant comme le catalyseur d'une mobilisation politique et sociale de masse de la classe ouvrière pour la défense de tous les services publics, du droit de grève et d'emplois sûrs et bien rémunérés.
Les travailleurs de la poste qui conviennent qu'une lutte couronnée de succès ne peut être menée qu'à travers l'intervention indépendante des travailleurs de la base dans ce combat politique devraient aider à construire le Comité de base des travailleurs des postes (CBTP) et y adhérer. Il est d'une importance décisive de s'allier à d'autres travailleurs à travers le Canada et à l'échelle internationale dans la lutte pour l'amélioration des conditions de travail, ce qui implique nécessairement une lutte contre l'austérité capitaliste, la dictature et la guerre.
Cette lutte doit se développer sur la scène internationale, c'est pourquoi le CBTP fait partie de l'Alliance ouvrière internationale des comités de base (IWA-RFC). Seule une organisation internationale, se basant sur les conditions objectives d'une économie mondialisée et rejetant la subordination de la vie et des moyens de subsistance des travailleurs au profit capitaliste, sera en mesure de défendre les conditions de travail et de mettre en œuvre des améliorations en accord avec ce que les nouvelles technologies rendent possible. L'IWA-RFC fournit le cadre organisationnel et la direction nécessaires pour coordonner les luttes des travailleurs au-delà des frontières nationales dans le cadre d'une contre-offensive menée par les travailleurs afin de faire passer les besoins sociaux de la grande majorité, notamment le droit à un emploi, à des services publics sûrs, à un logement et à des soins de santé abordables, avant les profits des entreprises. Remplissez le formulaire ci-dessous pour nous rejoindre.
(Article paru en anglais le 3octobre 2025)