Le gouvernement Trudeau refuse de publier les noms de 900 criminels de guerre nazis, de peur que cela ne nuise à la guerre OTAN-Ukraine contre la Russie

Au mépris des demandes des historiens, des survivants de l’Holocauste et de l’opinion publique, le gouvernement libéral du Canada censure un rapport secret vieux de près de quarante ans qui identifie quelque 900 criminels de guerre nazis ayant vécu ou vivant actuellement au Canada.

Cette décision scandaleuse est motivée par la crainte que la révélation de l’identité des nazis et des collaborateurs nazis ne nuise à la guerre déclenchée par l’OTAN contre la Russie en Ukraine.

Les partisans de la censure du rapport l’ont justifiée au nom de la lutte contre la «désinformation russe».

Quelle escroquerie! C’est l’État canadien qui cache la vérité. Il craint de voir mise à nue l’alliance de trois quarts de siècle de l’impérialisme canadien avec les fascistes ukrainiens qui ont collaboré avec les nazis pour commettre des crimes monstrueux, dont l’Holocauste, pendant leur «guerre d’anéantissement» autoproclamée contre l’Union soviétique.

Cette alliance se poursuit – en fait, elle est maintenant encore plus importante que jamais. L’État canadien et sa classe dirigeante collaborent étroitement avec les descendants politiques et idéologiques des complices ukrainiens des nazis, tant au Canada qu’en Ukraine.

Les actions du gouvernement libéral jettent un éclairage crucial sur les objectifs prédateurs qui motivent le soutien de l’impérialisme canadien à la guerre et sur le caractère fasciste des forces politiques qu’il emploie pour la poursuivre. Ottawa a déjà fourni plus de 12 milliards de dollars en soutien, dont au moins 4 milliards de dollars en aide militaire, au régime fasciste de Zelensky à Kiev depuis l’invasion réactionnaire de l’Ukraine par la Russie en 2022 qui a été provoquée par les États-Unis et l’OTAN. Le gouvernement Zelensky gouverne comme une dictature, vénère le nationaliste ukrainien d’extrême droite Stepan Bandera dont les partisans ont participé à l’Holocauste sur ses instructions – et emprisonne les opposants socialistes à la guerre soutenue par l’impérialisme qui a déjà coûté la vie au bas mot à un demi-million d’Ukrainiens, sinon plus.

La décision de ne pas publier les noms des 900 personnes identifiées dans une annexe secrète du rapport final de la Commission Deschênes sur les criminels de guerre au Canada, nommée par le gouvernement, a été prise après des «consultations à huis clos avec un groupe discret de parties prenantes» l’été et l’automne derniers. Ces «parties prenantes», selon un communiqué de presse du gouvernement, comprennent des «fonctionnaires de divers ministères», dont Affaires mondiales Canada, qui coordonne le commerce, les affaires étrangères et les interventions militaires de l’impérialisme canadien.

Ils comprennent également le Congrès des Ukrainiens Canadiens (CUC), organisation d’extrême droite défendant les collaborateurs nazis depuis 1946. Créé avec le soutien de l’État en 1940, le CUC a fait la promotion de l’anticommunisme et du nationalisme ukrainien d’extrême droite pendant la guerre froide. Au cours de la dernière décennie, il a joué un rôle encore plus important, travaillant main dans la main avec Ottawa pour préparer politiquement la guerre en Ukraine et rallier un appui.

Dans les années 1980, le CUC s’est battu bec et ongles pour empêcher la commission Deschênes d’enquêter sur la présence de collaborateurs nazis au Canada. Le gouvernement canadien les a récompensés en leur donnant un rôle officiel au sein de la Commission, où ils ont fait tout leur possible pour entraver ses travaux.

La Commission a publié un rapport aseptisé en 1986, qui équivalait à une dissimulation de la part de l’État. Si la seconde partie du rapport, tenue secrète, identifie 900 des plus tristement célèbres nazis et collaborateurs nazis, elle nie que le Canada ait systématiquement offert un refuge aux criminels de guerre et collaborateurs nazis dans le cadre d’une politique d’État. Deschênes a sèchement rejeté l’accusation selon laquelle des milliers d’entre eux auraient trouvé refuge au Canada, la qualifiant de «grossièrement exagérée».

Si les noms des 900 nazis étaient divulgués, l’impérialisme canadien serait confronté à une répétition, à une échelle bien plus grande encore, du scandale qui a éclaté en septembre 2023 lorsque le parlement canadien a ovationné à l’unanimité Yaroslav Hunka, un vétéran de la Waffen-SS âgé de 96 ans. Ci-dessus, Hunka est applaudi par les dignitaires de la tribune de la Chambre des communes. On aperçoit en partie le général Wayne Eyre, alors chef d’état-major de la défense du Canada, tout à fait gauche.

En septembre dernier, le CUC a envoyé une circulaire de collecte de fonds à ses membres afin de poursuivre le gouvernement et empêcher la déclassification de l’annexe secrète. Parmi les noms contenus dans le rapport figurent probablement des centaines de Canadiens d’origine ukrainienne, des vétérans de la tristement célèbre 14e Division Waffen-SS Galicie et des partisans des célèbres fascistes Stepan Bandera et Andrei Melnyk, les deux chefs rivaux de l’OUN – l’Organisation des nationalistes ukrainiens. Bon nombre des personnes citées dans l’annexe ont probablement participé directement à l’Holocauste des Juifs d’Europe.

Les survivants de l’Holocauste et leurs défenseurs ont été exclus de ces discussions.

Bibliothèque et Archives Canada, qui est chargé de préserver le rapport secret, pourrait tout aussi bien tenir un bâton de dynamite politique qui, s’il est allumé, pourrait révéler le fait que la collaboration historique de l’impérialisme canadien avec les nazis et les fascistes se poursuit aujourd’hui en Ukraine, où des milices nazies telles que Azov et Centuria se battent grâce aux armes et l’entraînement reçus du Canada. Ottawa a joué un rôle central dans l’intégration de ces milices dans l’Armée ukrainienne, qui, tout comme le gouvernement, embrasse explicitement le legs de Bandera et lutte pour l’assujettissement et le dépeçage de la Russie dans l’intérêt de l’impérialisme.

Le gouvernement canadien tente d’occulter les véritables motivations politiques de son refus de divulguer les noms des criminels de guerre et des collaborateurs nazis. Un porte-parole de Pascale St-Onge, la ministre politiquement influente du Patrimoine canadien, le ministère dont dépend Bibliothèque et Archives Canada, a déclaré qu’«il est impératif de divulguer les documents d’une manière responsable qui protège et préserve la sécurité individuelle, nationale et internationale».

La véritable signification de ces mots ambigus n’échappe à personne ayant une connaissance, même superficielle, de ces questions. Même le Globe and Mail, la voix traditionnelle de l’oligarchie financière de Bay Street, a titré son rapport sur la décision du gouvernement «Ottawa advised against releasing names of alleged Nazi war criminals over concerns for Ukraine» (Ottawa conseille de ne pas publier les noms des criminels de guerre nazis présumés en raison de préoccupations pour l’Ukraine).

La guerre menée en Ukraine contre la Russie s’inscrit dans la poussée des impérialismes canadien et américain pour rediviser le monde sur une base plus rentable pour les capitalismes nord-américain et européen. Les impérialistes tentent de masquer le caractère de classe de leur guerre en propageant des mensonges à propos de la protection de la «démocratie», des «droits de la personne» et de l’«indépendance» de l’Ukraine. L’identification des collaborateurs nazis nuirait à leurs efforts de propagande.

La relation historique de l’impérialisme canadien avec les criminels de guerre nazis et leurs collaborateurs fascistes d’Ukraine et des autres pays d’Europe de l’Est est un fait bien établi qu’aucun historien sérieux ne peut remettre en question. Ce fait démontre minutieusement le caractère frauduleux de toute prétention nationaliste canadienne selon laquelle le capitalisme canadien et son État constituent une alternative «plus gentille et plus douce» à la république du dollar des États-Unis plus rapace au sud.

C’est précisément parce que cette alliance de longue date d’Ottawa avec les fascistes ukrainiens est si bien documentée que l’État canadien et les médias de l’establishment déploient de vastes ressources pour la dissimuler et dénoncent quiconque la mentionne comme étant un laquais à la solde de Vladimir Poutine faisant la promotion de la «propagande» et de la «désinformation» russes.

Loin d’être de l’«histoire ancienne», cette alliance – comme le suggère la détermination du gouvernement à empêcher que la lumière soit faite sur ses origines – est aujourd’hui plus importante que jamais pour faire avancer les intérêts de l’impérialisme canadien. Quant à la nature de ces intérêts, le belliciste et fasciste sénateur américain Lindsay Graham les a récemment énoncés sans ambages. La guerre en Ukraine, a-t-il déclaré, est «une question d’argent», car «l’Ukraine est assise sur des minerais d’une valeur de 1.000 milliards de dollars qui pourraient être bénéfiques pour notre économie». Géographiquement, l’Ukraine est également la porte d’entrée du territoire de la Russie, qui dispose d’un stock bien plus important encore de richesses en ressources naturelles, et donnant en plus la possibilité d’encercler militairement la Chine. Bref, l’impérialisme canadien est actif en Ukraine car il veut sa part dans la conquête du monde.

Si les noms des 900 nazis étaient rendus publics, l’impérialisme canadien serait confronté à une répétition, à une échelle exponentiellement plus grande, du scandale politique qui a éclaté en septembre 2023 lors de l’ovation à l’unanimité de l’ancien combattant de la Waffen-SS Yaroslav Hunka, âgé de 96 ans à la Chambre des communes, alors dirigée par le gouvernement du Premier ministre Trudeau. Hunka, qui s’était porté volontaire pour combattre sous le Troisième Reich d’Hitler, avait alors été salué comme un «héros ukrainien ayant combattu les Russes pendant la Deuxième Guerre mondiale». Hunka avait été invité au Parlement en tant qu’invité d’honneur par le cabinet du Premier ministre, sur les conseils d’influents partisans du CUC, pour écouter un discours belliciste de Zelensky.

La politique de porte ouverte pour les nazis

À partir de 1947, deux ans seulement après la fin de la Deuxième Guerre mondiale, l’État canadien a commencé à admettre sur son territoire des criminels de guerre et des collaborateurs nazis connus pour servir d’avant-garde anticommuniste contre la classe ouvrière. Dans un message personnel adressé au ministre du Travail en 1948, le Premier ministre Louis Saint-Laurent a écrit que les fascistes sont «des gens qui ont démontré qu’ils sont des hommes libres et qu’ils sont de notre côté de la ligne dans la lutte contre le communisme».

Les 900 noms contenus dans la deuxième partie du rapport de la Commission Deschênes sont ceux de nazis endurcis contre lesquels le gouvernement fédéral a recueilli des preuves en vue de poursuites qui n’ont jamais été engagées. Mais ces 900 noms ne sont que la partie émergée d’un énorme iceberg, constitué de dizaines de milliers de fascistes et de collaborateurs moins connus, originaires de divers pays d’Europe de l’Est.

Le CUC s’oppose fermement à la publication de ces noms, car il sait que les complices ukrainiens des nazis constituent le groupe le plus important de ces personnes.

Affiche de recrutement de la 14e Division Waffen-SS Galicie. Le texte se lit comme suit: «Celui qui veut vivre doit se battre, et celui qui refuse de se battre dans ce monde de lutte éternelle n’a pas le droit de vivre. Adolph Hitler», puis en dessous: «La SS galicienne part au combat!»

La 14e Division Waffen-SS Galicie, dont au moins deux mille membres ont fini par trouver refuge au Canada, a été créée en 1943 à l’instigation du Comité central ukrainien, une branche de l’OUN-Melnyk, organisation entièrement fantoche du «Gouvernement général de Pologne» nazi. Le journal du Comité, Krakivski Visti, avait comme rédacteur en chef Mikhail Chomiak – le grand-père de Chrystia Freeland, vice-première ministre et ministre des Finances du Canada jusqu’à sa démission très médiatisée le mois dernier. Chomiak était chargé des relations du journal avec ses commanditaires nazis. La 14e Division Waffen-SS Galicie était impliquée dans le meurtre de masse de Polonais, de Juifs et de partisans slovaques. Elle s’est rendue aux Alliés en 1945, quelques jours seulement après s’être cyniquement rebaptisée «Première division de l’armée nationale ukrainienne», dans un vain effort de dissimulation de ses crimes. De nombreux soldats de l’unité l’ont rejointe après avoir servi dans les bataillons de police spéciale collaborationnistes qui ont perpétré l’Holocauste en Ukraine de 1941 à 1942.

Le CUC a maintenu le mensonge selon lequel le rapport de la commission Deschênes a disculpé l’ensemble de la Division dans son rapport de blanchiment de 1986, celle-ci refusant d’examiner les preuves qui n’étaient disponibles à l’époque qu’en Union soviétique et en Pologne. Lorsque ces preuves ont été examinées par la suite, elles ont établi sans l’ombre d’un doute que la Division avait perpétré des massacres de Polonais, de Juifs et de Slovaques.

Le CUC insiste de manière mensongère sur le fait que puisque la 14e Division Waffen-SS Galicie n’a jamais été nommée spécifiquement par le tribunal de Nuremberg, ses membres étaient innocents. En fait, le tribunal de Nuremberg a établi que le simple fait d’appartenir à une division de la Waffen-SS était un crime en soi. Lorsque cette erreur d’interprétation a été relevée, le CUC a déclaré que les membres de la division «n’avaient pas d’autres choix». Mais c’est là encore un autre mensonge éhonté de plus. Comme le révèle le rapport complémentaire au rapport principal Deschênes rédigé par l’historienne Alti Rodal, «l’afflux (de volontaires ukrainiens dans les rangs de la Division nazie) était si important que même les Allemands en ont été étonnés». Lorsque cet autre mensonge des nationalistes ukrainiens s’est effondré, ils se sont repliés avec comme faible excuse que les soldats de la Waffen-SS – malgré le fait qu’ils portaient des uniformes nazis et prêtaient serment d’obéissance à Adolph Hitler – «pensaient se battre pour l’Ukraine».

La Commission Deschênes a entièrement ignoré une catégorie encore plus importante de collaborateurs nazis ukrainiens qui ont trouvé refuge au Canada, à savoir les membres de l’aile banderiste de l’OUN et de son Armée insurrectionnelle ukrainienne (UPA), qui ont combattu l’Armée rouge soviétique en collaboration avec les nazis. Comme beaucoup de partisans de Melnyk, de nombreux membres de l’UPA avaient, à l’instigation de Bandera, rejoint la police auxiliaire ukrainienne créée par les nazis, et qui aidait activement les SS dans leurs arrestations et massacres de masses des Juifs.

Le principal commandant de l’UPA et proche collaborateur de Bandera, Roman Shukhevych, a combattu dans les équipes dites de protection nazie, les «Schutzmannschaften-batallione», des bataillons chargés de mener à bien la «Vernichtungskrieg», ou guerre d’anéantissement des nazis contre l’Union soviétique.

Le CUC a lutté sans relâche pour blanchir les crimes des complices ukrainiens des nazis, qualifiant même de «combattants de la liberté» l’UPA, organisation responsable de massacres de masse bien documentés de Polonais et de Juifs. Sa propagande comprend le mensonge selon lequel l’UPA «combattait à la fois les nazis et les Soviétiques». En réalité, seulement 6% des pertes de l’OUN/UPA peuvent être attribuées à des escarmouches avec les nazis. La grande majorité de leurs pertes provient des combats qu’ils ont menés contre les Soviétiques.

Dans son rapport, l’historienne Alti Rodal souligne que c’est l’amalgame entre les Juifs et le bolchevisme, via l’amalgame nazi du «judéo-bolchevisme», qui a fourni la principale justification idéologique de l’Holocauste en Ukraine. Elle cite une déclaration d’avril 1941 de l’OUN-B selon laquelle «les Juifs d’URSS constituent le soutien le plus fidèle au régime bolchevique en place et l’avant-garde de l’impérialisme moscovite en Ukraine». Rodal souligne que «la collaboration principale et, pour les Juifs, la plus dévastatrice, venait de secteurs organisés de la société ukrainienne, tels que les administrations municipales prises en charge par des éléments nazis, et en particulier des formations de police auxiliaires et semi-militaires ukrainiennes sous commandement allemand, qui avaient pour fonction spécifique d’aider la police allemande et les SS à capturer et à fusiller les Juifs».

Tels sont les éléments sociaux que le CUC et l’État canadien cherchent à blanchir, à excuser politiquement et à dissimuler les crimes, et pour lesquels l’État canadien a déroulé le tapis de bienvenue au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, le tout afin de les utiliser comme instrument dans sa politique de guerre froide, et avec les descendants politiques desquels l’impérialisme canadien travaille aujourd’hui en étroite collaboration.

Outre ces criminels de guerre ukrainiens, le rapport Rodal, à l’instar de plusieurs dossiers déclassifiés de la CIA, a établi que le Canada a admis maints collaborateurs nazis et fascistes, notamment:

  • Des scientifiques nazis approuvés personnellement par le Premier ministre Louis Saint-Laurent et le «ministre de tout» C.D. Howe, malgré les objections des scientifiques canadiens travaillant dans l’Allemagne d’après-guerre. Le projet s’est rapidement étoffé pour accueillir 71 scientifiques nazis de haut niveau, dont aucun n’a jamais été identifié.

  • D’importants dirigeants fascistes de la Deuxième Guerre mondiale, dont Ferdinand Durcansky, et Karol Sidor, en Slovaquie. Le Premier ministre Saint-Laurent est intervenu personnellement pour faire venir ces derniers au Canada.

  • Des officiers estoniens, lettons et lithuaniens complices du meurtre de dizaines de milliers de Juifs et de partisans.

  • Des sadiques provenant du système des camps de concentration, tels que le tristement célèbre Radovan Charapic, alias «Radon», et qui ont ensuite été utilisés par la GRC comme espions de la police. Charapic était le tristement célèbre commandant adjoint du camp de concentration de Banjica, où plus de 3.800 personnes ont été assassinées.

  • Des collaborateurs fascistes et nazis roumains, hongrois, slovaques, serbes, croates et autres, dont beaucoup ont ensuite joué un rôle de premier plan dans des organisations d’extrême droite expatriées au Canada, et qui ont bénéficié de la protection des gouvernements canadiens successifs.

Les complices des nazis comme police du travail

Au début de la guerre froide contre l’Union soviétique, l’impérialisme canadien s’est tourné vers des collaborateurs nazis ukrainiens et autres pour qu’ils agissent comme police du travail contre la classe ouvrière au pays. Admis par le biais du «Bulk Labour Program» (programme de travail de masse) à partir de 1947, ces nazis «exerçaient une très saine influence anticommuniste», selon le sénateur libéral canadien Thomas Crerar en 1948.

Cette «influence» consistait notamment à attaquer les travailleurs socialistes avec des tessons de bouteilles, à coups de poing et à coups de matraque, et de bombes incendiaires. De 1948 et jusqu’aux années 1960, les collaborateurs nazis ukrainiens ont mené une guerre de terreur au sein du mouvement syndical canadien contre les personnes soupçonnées d’être communistes ou socialistes. Les réunions socialistes étaient attaquées et dispersées, leurs orateurs et participants violemment battus.

Article du Winnipeg Tribune du 17 octobre 1949 rapportant l’attaque d’une réunion publique de socialistes ukrainiens à Winnipeg par des collaborateurs nazis ukrainiens récemment arrivés au Canada et jouissant de l’approbation tacite de la police. [Photo: Winnipeg Tribune] [Photo: Winnipeg Tribune]

En 1950, des collaborateurs nazis ukrainiens ont mené un attentat à la bombe contre le Temple du travail ukrainien de Toronto. Les principaux suspects de l’attentat ont par la suite joué un rôle important dans la société canadienne, s’agissant notamment de Dmytro Dontsov, professeur à l’université de Montréal, et de Roman Rachmanny, partisan du fasciste Stepan Bandera et fondateur du journal banderiste «Homin Ukrainiy». Rachmanny était l’organisateur des émissions de propagande en langue ukrainienne de CBC en URSS.

Des années 1950 aux années 1980, l’État canadien a fait campagne pour l’éclatement politique de l’URSS en petits États ethniques, par l’intermédiaire du service en langue ukrainienne de la CBC et par son parrainage politique du Bloc des nations antibolchéviques, dont John Diefenbaker, Premier ministre de 1957 à 1963, s’est révélé être l’un des principaux défenseurs politiques. Les Premiers ministres Lester Pearson, Pierre Elliot Trudeau et Brian Mulroney ont tous soutenu l’extrême droite ukrainienne et est-européenne.

Lorsque la bureaucratie stalinienne a dissous l’URSS en 1991, les nationalistes ukrainiens sont devenus encore plus importants pour la politique étrangère impérialiste du Canada, et les liens d’intérêts et d’associations entre le CUC et l’État canadien se sont donc encore plus développés. Pour l’impérialisme canadien, les forces nationalistes ukrainiennes fascisantes qu’il avait couvées pendant des décennies sont soudain devenues des atouts opérationnels qu’il pouvait déployer sur le terrain, au lieu de se contenter de les promouvoir politiquement à distance.

Des nationalistes de droite tels que l’adolescente Chrystia Freeland sont intervenus activement en Ukraine soviétique, d’où elle a été expulsée en 1989. Sa mère, Halyna Chomiak, a ensuite participé à la rédaction de la constitution capitaliste de l’Ukraine postsoviétique.

Dans un premier temps, les nationalistes ukrainiens canadiens ont constaté que leurs mauvaises herbes fascistes refusaient de germer dans le terreau de l’Ukraine et qu’elles devaient être soigneusement transplantées et arrosées. Dans son essai de 2015 intitulé Putin’s Big Lie, Freeland faisait remarquer que «la conscience nationale de l’Ukraine est faible». Cette «conscience nationale», exprimée sous la forme de l’idéologie néo-nazie banderiste de l’OUN et entièrement fondée sur des mensonges, devait donc être transmise de force aux Ukrainiens de l’Ukraine proprement dite, et qui, bien que ce ne soit pas de leur faute, étant éloignés de la tradition socialiste révolutionnaire et impitoyablement écrasés par la catastrophe économique résultant de la destruction de l’URSS, n’avaient pas grand-chose d’autre à se mettre sous la dent.

S’entretenant dans les années 1990 avec l’universitaire Michael Ignatieff, qui allait plus tard diriger le Parti libéral au niveau fédéral, Freeland s’est montrée encore plus explicite sur la nécessité d’injecter le nationalisme ukrainien d’extrême droite dans le corps politique de l’Ukraine. Résumant une interview qu’il avait réalisée avec elle alors qu’elle était encore une jeune journaliste, Ignatieff écrit dans son ouvrage Blood and Belonging: «Il est courant [selon Freeland] que les Ukrainiens canadiens se considèrent comme les vrais Ukrainiens, ceux qui ont gardé la foi alors que chez les Ukrainiens actuels, la contrainte et le fatalisme du système communiste ont fait leur chemin jusqu’à leurs os. Les Canadiens d’origine ukrainienne rentrent chez eux en s’attendant à trouver un peuple nationaliste et religieux fervent, mais ils trouvent à la place des âmes soviétiques flegmatiques, ironiques, sobres et fatalistes. L’indépendance exige un nouveau type d’être humain, mais elle dit... qu’il faudra beaucoup de temps pour y parvenir.»

Freeland est devenue la plus puissante représentante du nationalisme ukrainien d’extrême droite au sein de l’État canadien. Mais elle n’est pas la seule. L’ancien directeur du CUC, Taras Zalusky, est le chef de cabinet de Bill Blair, actuel ministre de la Défense nationale. Un autre ancien directeur du CUC, Paul Grod, a accompagné le Premier ministre Trudeau, ainsi que son prédécesseur, Stephen Harper, et d’autres hauts fonctionnaires canadiens lors de nombreuses délégations commerciales et politiques en Ukraine.

Tant sous les gouvernements libéraux que conservateurs, et avec le soutien inconditionnel du NPD et des souverainistes québécois, l’impérialisme canadien s’est employé, au cours des 30 dernières années, à mettre l’Ukraine «indépendante» au service de l’impérialisme occidental. Le Canada a ainsi été le premier État à reconnaître l’«indépendance» de l’Ukraine, lorsque la bureaucratie stalinienne, au terme de ses trahisons, a restauré le capitalisme et dissous l’Union soviétique. Ottawa a fait pression pour que l’OTAN encercle la Russie, en incorporant pratiquement tous les États d’Europe de l’Est, puis, en 2008, a exhorté George W. Bush à faire entrer l’Ukraine dans l’OTAN. Comme le suggèrent les commentaires de Freeland cités plus haut, Ottawa a travaillé avec le CUC pour promouvoir en Ukraine la marque virulente du nationalisme ukrainien anticommuniste et antirusse qu’il a couvé au Canada pendant la guerre froide. Les forces ukrainiennes d’extrême droite ont été le fer de lance du coup d’État de Maïdan de 2014, orchestré par les États-Unis et soutenu politiquement et logistiquement par le Canada – coup d’État qui a renversé le président ukrainien pro-russe élu, Victor Ianoukovitch, et porté au pouvoir un gouvernement pro-OTAN et pro-Union européenne. Avec le soutien du Canada, les descendants politiques d’extrême droite de Bandera en sont venus à jouer un rôle de plus en plus important en Ukraine au sein de l’État et de l’armée, en tant que plus fervents partisans de la guerre contre la Russie.

L’État canadien et ses alliés fascistes ne veulent pas que les travailleurs entendent cette histoire, car la vérité saperait le soutien du public à la guerre. Le CUC et le gouvernement canadien cherchent donc à faire taire toutes les voix anti-guerre de principe, en faisant campagne pour empêcher les réunions du Mouvement international des étudiants et des jeunes pour l’égalité sociale, ainsi que pour empêcher les travailleurs de visionner des films et des œuvres d’art critiques à l’égard de la guerre en Ukraine. En Ukraine même, le socialiste Bogdan Syrotiuk, membre éminent de la Jeune Garde des bolcheviks-léninistes, qui fait campagne pour l’unification des travailleurs ukrainiens et russes afin d’arrêter la guerre et qui lutte pour le renversement de tous les gouvernements belligérants, est maintenant emprisonné depuis près de dix mois.

La campagne de guerre de l’impérialisme canadien, pour ne pas parler de l’influence réactionnaire du CUC, serait sérieusement ébranlée si les travailleurs canadiens connaissaient la vérité sur l’alliance du Canada avec les criminels de guerre nazis et leurs complices remontant à la guerre froide et sur ce qu’elle a engendré au XXIe siècle.

C’est pourquoi il faut exiger avec force la publication immédiate des noms des 900 personnes que la Commission Deschênes a identifiées comme étant des criminels de guerre nazis, ainsi que la divulgation entière de toutes les preuves allant à leur encontre et de tous les dossiers relatifs à leur entrée au Canada et à leurs liens ultérieurs avec l’État canadien.

(Article paru en anglais le 19 janvier 2025)

Loading