Le samedi 15 novembre, une semaine seulement après la mort de Nick Acker à Detroit, un autre employé de la poste est décédé au centre de traitement et de distribution de l'USPS à Palmetto, en Géorgie. La famille a confirmé au World Socialist Web Site que Russell Scruggs Jr est l'employé qui a perdu la vie. La cause du décès n'a pas encore été communiquée et une enquête est en cours.

L'USPS a seulement confirmé lundi à la chaîne d'information locale 11Alive qu'un décès était survenu dans ses locaux. Des collègues ont déclaré au WSWS que Russell était mort dans l'usine après être tombé et avoir heurté le sol avec la tête. La cause exacte de sa chute reste incertaine, mais les employés ont fait part de leurs inquiétudes concernant l'absence de protocole d'urgence médicale et l'absence totale de réseau mobile dans la majeure partie du bâtiment, ce qui retarde considérablement leur capacité à appeler à l'aide. Le décès de Russell n'est pas le premier incident de ce type au centre de Palmetto. Au moins deux autres employés sont décédés dans l'usine depuis l'année dernière.

Le décès de Russell

Jane, une collègue de Russell dont le nom a été changé pour protéger son identité, a contacté le WSWS après avoir lu un article sur le décès de Nick Acker, un employé des postes de 36 ans, à Allen Park, dans le Michigan.

« Russell était une personne très attentionnée et il faisait toujours passer les autres avant lui. Nous sommes des êtres humains et nous méritons d'avoir des droits en tant que tels. Une chose aussi simple que d'avoir un téléphone portable pour pouvoir appeler ses proches ou pour que quelqu'un puisse vous appeler ne devrait pas vous être retirée. Ce n'est pas un privilège, c'est un droit », a-t-elle déclaré.

Elle a raconté que Russell « gisait sur le sol sous une machine, dans une mare de sang. Il avait une grosse entaille à la tête après avoir heurté la machine en tombant et il y avait du sang partout. Sa tête a saigné abondamment pendant 45 minutes et personne ne s'occupait de lui : ils ne lui faisaient pas de réanimation cardio-pulmonaire, ils n'avaient pas vérifié son pouls, ils n'avaient pas essayé de le réanimer ni de s’occuper de sa blessure à la tête.

« Certains superviseurs se tenaient autour de lui. Il n'était pas couvert, personne ne s'occupait de lui. Nous avons demandé : “Quelqu'un a-t-il vérifié s'il respirait ?” Et ils ne faisaient rien. Ils restaient tous là, sans rien faire.

« Ils ont déplacé l'une des travailleuses qui se trouvaient là vers une pièce dans un bureau, pour ne pas qu’elle voie Russell.

« Tout cela s'est passé près de la pointeuse. Ils ont pris un carton et l'ont placé autour de lui pour que les autres ne puissent pas le voir, car les gens pointaient. Ils disaient aux gens : “Retournez à votre travail, ne vous occupez pas de pointer, nous nous occuperons de la paperasse plus tard.”

« Finalement, une agente de sécurité a été appelée et elle a commencé à lui faire un massage cardiaque. Elle a essayé encore et encore jusqu'à l'arrivée des secours. Pendant tout ce temps, il ne respirait toujours pas », a-t-elle poursuivi. « Il m'a semblé qu'il était déjà mort au moment où ils ont appelé les secours. »

Trop tard pour une intervention médicale

Elle a déclaré que même après l'arrivée des services d'urgence, « cela a pris trop de temps. L'ambulance est arrivée, ils l'ont mis sur une civière et ont continué à lui faire un massage cardiaque. Il fallait environ 10 minutes pour aller de l'endroit où nous étions à la porte où se trouvait l'ambulance afin de transporter son corps. Il a ensuite fallu 15 minutes supplémentaires avant que l'ambulance ne quitte le bâtiment. »

Elle a déclaré que la famille de Russell lui avait dit que le médecin qui s'était occupé de lui à l'hôpital avait déclaré qu'il « était apparemment déjà mort lorsqu'ils l'ont pris en charge et mort à son arrivée à l'hôpital ».

Nous avons demandé à Jane si l'USPS, le directeur de l'usine ou le syndicat américain des postiers (APWU) avaient publié des déclarations sur la mort de Russell à l'intention des autres employés. « Ils n'ont fait aucune déclaration, ils ne nous ont rien envoyé dans ce bâtiment. Beaucoup de gens sont morts dans ce bâtiment et ils ne font jamais de déclaration officielle.

« Sa famille a dû appeler là-bas pour savoir ce qui s'était passé et je ne sais pas ce qu'ils leur ont dit, mais ce n'était pas grand-chose. Son propre père n'aurait même pas connu les détails si un autre employé n'avait pas contacté la famille. Russell venait de commencer à travailler là-bas il y a trois semaines.

« Ils ont des caméras là-bas. Ils ne savent pas s'il a trébuché, ils ne savent pas s'il est tombé ni pourquoi », a-t-elle poursuivi. « Il y a des gens là-bas qui ont été témoins, qui ont dit avoir vu ce qui s'est passé. » Jane a déclaré qu'un employé qui avait initialement déclaré qu'il y avait des témoins avait ensuite changé son histoire pour dire qu'il n'y avait pas de témoins. « C'est un mensonge, tout le département était rempli de gens qui ont été témoins de ce qui s'est passé. Je connais des personnes dans ce département qui ont vu [la chute]. Les personnes qui arrivaient pour prendre leur service ont vu ce qui se passait. »

Absence de protocoles d'urgence, manque d'équipement médical et de formation

Jane a reproché à la direction de l'usine d'avoir perdu un temps précieux qui aurait pu sauver la vie de Russell. Les employés n'ont pas accès au téléphone à l'intérieur du bâtiment, c'était donc à la direction qu'il incombait d'appeler les secours.

« L'un d'entre nous a demandé à la direction : “Pourquoi l'ambulance met-elle autant de temps à arriver ?” Il a répondu que leur protocole consistait à appeler d'abord la sécurité, puis que la sécurité appelait l'ambulance », a-t-elle déclaré. « Ma question est la suivante : pourquoi faire cela ? Pourquoi ne pas appeler d'abord l'ambulance plutôt que la sécurité ? Aucun membre de la sécurité n'a de formation médicale. Ils appellent la sécurité comme s'il s'agissait d'une scène de crime, mais une personne est en train de mourir ici. Et aucun des superviseurs n'a reçu de formation ou n'a de protocole à suivre en cas d'urgence. »

« Ils n'ont pas de défibrillateur », a-t-elle poursuivi. « Ils n'ont rien pour former au massage cardiaque. Rien, pas de triage ni rien d'autre. La seule chose qu'ils avaient, c'était une trousse de premiers secours accrochée au mur. Et puis ils n'ont pas de téléphone d'urgence, même s'ils savent que leur bâtiment n'a pas de réseau. S'il existe une ligne téléphonique d'urgence, ils ne nous l'ont pas dit, car nous ne pouvons recevoir aucun appel, personne ne peut appeler là-bas. »

« L'USPS doit fournir ces services et ses employés doivent être formés. » Elle a souligné qu'il s'agissait d'un emploi fédéral. « Ils doivent former les gens pour qu'ils sachent quoi faire en cas d'urgence. Les établissements devraient être tenus de dispenser une formation sur les traitements médicaux et la sécurité. »

Autres décès au centre de Palmetto

Il y a eu de nombreux autres décès dans ces mêmes locaux. En août 2024, Sharon Barnes, 48 ans, est décédée pour des raisons qui n'ont jamais été confirmées publiquement. Jane a déclaré au WSWS qu'une de ses collègues était présente lorsque cela s'est produit. « Sharon a dit à ma collègue qu'elle ne se sentait pas bien. Je ne sais pas si elle a eu un coup de chaleur, mais elle s'est évanouie. Ma collègue l'a rattrapée dans ses bras et je pense qu'elle a fini par avoir une attaque cérébrale.

« Mais elle a attendu là, en criant et en hurlant, sans que personne ne l'entende à cause du bruit des machines. Il a fallu environ 30 minutes avant qu'un superviseur n'arrive. Et même dans cet incident, il a fallu encore 30 minutes pour que l'ambulance arrive. Ils sont allés du mauvais côté du bâtiment. Notre bâtiment fait un million de mètres carrés et elle se trouvait à l'arrière. »

À l'époque, la famille et les collègues de Sharon se sont plaints de l'absence de réseau mobile à l'intérieur du bâtiment, mais en vain. Sa famille a soulevé des questions concernant le délai entre le moment où elle a perdu connaissance et celui où elle a finalement été transportée à l'hôpital, où les médecins ont déclaré à la famille qu'elle était déjà décédée à son arrivée, selon WSB-TV Atlanta.

En juin 2025, deux autres incidents mortels se sont produits. Eric Smith, un technicien électricien de 59 ans, a eu une crise cardiaque et est décédé dans la salle à manger. Jane a déclaré au WSWS qu'un autre homme, dont le nom et la cause du décès n'ont jamais été révélés, est décédé une semaine seulement après Eric. Elle a également rapporté un incident au cours duquel la maison d'une postière a pris feu, mais en raison de l'absence de réseau cellulaire, les pompiers n'ont pas pu la joindre et elle n'a appris que sa maison était en feu qu'en quittant son travail.

« Nous avons donc tous ces incidents, et maintenant Russell. Je ne sais pas s'il a eu une crise cardiaque ou ce qui s'est passé. Mais ce qui lui est arrivé est fou », a-t-elle déclaré. « Il n'y avait aucun soin médical pour lui. Cela n'avait aucun sens. C'est insensé. Cela n'aurait jamais dû arriver. Je ne comprends pas cela. Nous sommes des êtres humains, nous devons être traités comme tels. Et le manque de choses élémentaires comme des soins médicaux ou l'accès à un téléphone [...] ça n'a tout simplement aucun sens. »

Le programme « Delivering for America »

Le lancement du centre de traitement et de distribution de Palmetto s'inscrivait dans le cadre d'une consolidation des installations postales dans le cadre du programme « Delivering for America », un plan de restructuration qui vise à automatiser les emplois, à réduire les itinéraires et à fermer des installations afin de préparer l'USPS à la privatisation.

11Alive a rapporté l'année dernière des retards importants et d'autres problèmes dans cette installation, conséquence directe de la mise en œuvre du programme « Delivering for America ».

Une stratégie pour que la vie des travailleurs ait priorité sur le profit

Les travailleurs qui ont assisté dimanche après-midi à une réunion de l'Alliance ouvrière internationale des comités de base (IWA-RFC) pour discuter d'une stratégie de lutte contre les conditions de travail dangereuses, les licenciements et la faim se sont exprimés sur la question de la sécurité au travail. Il a été expliqué que les décès de travailleurs tels que Nick Acker et Russell Scruggs Jr sont le résultat d'un système qui privilégie le profit au détriment de la vie et de la sécurité des travailleurs. La discussion, à laquelle ont participé des travailleurs de tous les États-Unis et du monde entier, a montré que les travailleurs commencent à tirer les conclusions qui s'imposent.

La lutte pour faire la lumière sur ces décès et pour prévenir de futures tragédies nécessite la création de comités de base dans chaque lieu de travail, dirigés démocratiquement par les travailleurs eux-mêmes et indépendants de l'appareil syndical.

Nous invitons les postiers et les travailleurs de toutes les industries qui souhaitent partager des informations, dénoncer des conditions dangereuses et se joindre à la lutte pour créer des comités de base à contacter le World Socialist Web Site.

(Article paru en anglais le 18 novembre 2025)